« Standing ovation ! », ordonnent ces maîtres de cérémonie au terme d’une avant-première avant que certains, après s’être mis debout, ne fassent sauter boutons de costumes et/ou de manchettes pour mieux enfiler les petits fours. Ceux sur lesquels une tapenade se bat sur une minuscule tranche de pain, découpée par un chef ou une cheffe, entre deux coups de feu, façon The Bear ; une série où la place de l'homme est à la cuisine.
Parfois, sans être cuisiné, l’adversaire pourtant humilié ovationne le bourreau qui traîne encore sous les lieux du crime, et ses chaussures blanches recouvertes de traces de la pelouse qu’il a foulée et de dignité de la part d’adversaires, qu’il a dribblés. Il y a 18 ans de cela, Ronaldinho Gaucho était ovationné par le Santiago Bernabéu. Souviens-toi de ce 19 novembre 2005.
L’ETO’O S RESSERRE SUR MADRID
Le Clàsico, remporté dernièrement par le Real Madrid grâce Jude Bellingham qui a calmé l’ardeur des barcelonais, à commencer par son chien de garde Gavi, a toujours été un rendez-vous immanquable, encore plus dans les années. À cette époque, c’était une véritable guerre des étoiles que Georges Lucas, le père de la saga spatiale, aurait pu s’offrir non sans avoir le chéquier.
D’un côté, Iker Casillas, Roberto Carlos, mais aussi Sergio Ramos, qui n’avait pas encore activé le côté hipster, ou encore Raul, Ronaldo et Zinedine Zidane. Le Français dispute sa dernière saison avant d’aller faire danser les Brésiliens à la coupe du Monde 2006.
De l’autre côté, ce n’est pas mal, mais alors pas du tout puisqu’il y a pêle-mêle : Carles Puyol, Xavi, mais aussi Deco, pour alimenter un certain Lionel Messi, Samuel Eto’o et surtout Ronaldinho Gaucho.
Pour ce choc de la 12ème journée, entre les deux équipes uniquement séparées par un seul point, le Barça étant deuxième avec 22 points et le Real Madrid, troisième avec 21 points donc.
Parce qu’il avait apparemment décidé de laisser son camerounais de coéquipier lui voler la vedette, c’est tout naturellement qu’Eto’o ouvre le score à la 15ème minute. Et de quelle manière.
Récupérant un ballon de Lionel Messi, « le neuf » se retourne, échappe à la surveillance d’une bonne demi-dizaine d’adversaires, parmi lesquels Sergio Ramos, déjà incapable de retenir un attaquant adverse, avant d’inscrire son 11ème but de la saison. L’ex-Madrilène terminera Pichichi avec 26 réalisations au total.
Barcelone 1 – Real Madrid 0. Mais le clou du spectacle façon Power Point c’est en seconde mi-temps.
ET RONALDINHO D’ENTRER EN SCÈNE
Avant de retourner au pays pour y terminer sa carrière, Ronaldinho a frappé/marqué/traumatisé les esprits ; particulièrement ce 19 novembre 2005. Tant le champion du monde 2002 et Ballon d’Or 2003 était au-dessus du lot. Ce ne sont pas Michel Salgado ou encore Sergio Ramos qui diront le contraire. Hon hon.
66ème. Giovanni van Bronckhorst sert le Brésilien. Sur son aile gauche, personne l’attaque. Alors, il passe la première, accélère, élimine Sergio Ramos, encore lui, qui s’est jeté, pénètre ensuite dans la surface madrilène à vive. Lancé à vive allure, Ivan Helguera ne peut faire faire sur lui. Alors, l’Espagnol met le corps en opposition avant que Roberto Carlos ne se jette pour tacler. Nous savons, ils savent que c’est insuffisant.
Le numéro 10 catalan place le ballon hors de portée d’Iker Casillas et inscrit son 7ème but de la saison. Il en inscrira 17 cette saison pour une honnête 3ème place au classement des meilleurs buteurs.
Barcelone 2 – Real Madrid 0.
Un peu moins de vingt minutes plus tard, on prend le même et on recommence.
Aile gauche toujours mais cette fois-ci Deco à la passe.
Sergio Ramos n’ayant pas toujours pas retenu la leçon, lui donnant certainement trop de mou, Ronaldinho se représente à nouveau devant lui, lancé à pleine vitesse again, avant d’entrer dans la surface, effleure le ballon de son pied droit pour battre ensuite Iker Casillas d’une frappe côté opposé. Copier-coller du premier but, avec cette insolente facilité indolente. Unstoppable.
C’est le moment choisi par le Santiago Bernabéu, et ses 80 000 spectateurs pour lui offrir une standing ovation bien méritée. Incroyable mais vrai.
D’autres auront aussi ce privilège quelques années plus tard.
DEL PIERO, INIESTA… CES AUTRES STARS OVATIONNÉES À MADRID
Ligaments croisés mais bon, Alessandro Del Piero les connaît ; lui qui les a eus le 8 novembre 1998. Il ne sera plus jamais le même. La blessure l’ayant obligée à faire évoluer son jeu de neuf ½ ; une espèce aujourd’hui en voie de disparition. Mais le talent du grand rival de Roberto Baggio à l’époque, lui, reste intact.
Et le Santiago Bernabéu en a été un témoin privilégié quand l’Italien inscrit un doublé le 5 novembre 2008, après en avoir déjà marqué un à l’aller, lors de la phase de poules de la Champions League.
Spécialiste du genre, le champion du monde 2006 mettra un de ses coups francs dont lui seul avait le secret. Ça méritait bien une standing ovation pour le capitaine turinois qui ce soir-là brilla autant que le maillot de la Vielle Dame.
Quelques années plus tard, c’est un autre artiste qui lui aussi reçu une standing ovation : Don Andrès Iniesta.
21 novembre 2015, Clàsico. En cette12ème journée, again, le Real Madrid reçoit le Barça. Nous sommes encore en plein duel Ronaldo/Messi, qui est terminé depuis que les deux sont allés voir si les billets sont plus verts chez les voisins. Mais sans le climat délétère qui régnait quand José Mourinho était sur les bancs respectifs.
Cette fois-ci, ce sont Rafael Benítez, qui sera d’ailleurs remplacé par Zidane, et Luis Enrique, actuel entraîneur du Paris Saint-Germain, qui s’affrontent. Si le Twilight Uruguayen ouvre le score, Andrès Iniesta éclabousse le Clàsico en l’absence de l’Argentin sur le banc des remplaçants. Passeur décisif pour Neymar sur le deuxième but, le Brésilien lui rend ensuite la pareille.
53ème minute de jeu : mouvement collectif barcelonais Neymar – Rakitic – Iniesta. L’Espagnol retrouve le Brésilien aux avant-postes : petite talonnade du Brésilien pour Iniesta.
Déboulant de nulle part ou presque, le champion du monde 2010 allume Navas. La frappe termine dans la lucarne du costaricain. Real Madrid 0 - Barcelone 3. Le meilleur ami de Patrice Évra en mettra un autre mais il en faudra plus pour voler la vedette à Iniesta ; lui qui a été privé du Ballon d’Or 2010 pour finir dans les bras de qui tu sais.
Fin connaisseur, Bernabéu l’ovationne comme Ronaldinho avant lui.
Et ce 19 novembre 2005 où, sans instruction particulière, ni consigne, les Madrilènes ont exécuté un ordre : « Standing ovation ! »